« Méditerranée, terroir divin » : Reportage en Croatie : Péninsule de Pelješac – Textes : Laurence Crinquant – Photographies : Claude Cruells

 


 

Vendredi 24 mai. Km 2800 : Nous quittons la dernière île croate de notre périple, Korcula, pour rejoindre la presqu’île de Pelješac et découvrir ses vignobles.

Désormais, nous ne comptons plus le nombre de traversées en ferry que nous avons effectué depuis le début de notre campagne de reportages sur l’Adriatique. Celle-ci ne dure qu’un quart d’heure, et nous nous retrouvons rapidement à Orebic. Prenant la direction du village de Potomje, nous parvenons au pied de la montagne de Dingac, côté plaine.

Cette étape n’était pas initialement prévue sur notre feuille de route, mais nous l’avions remarquée pour l’originalité de ses paysages viticoles de l’extrême lors d’un précédent parcours. Aucune rencontre avec un ou des vignerons n’a été donc été programmée. Aussi, échapper au programme établi, pour d’autres raisons que les aléas de la météo, nous réjouit-il !

A propos de la Péninsule de Pelješac

C’est la plus longue péninsule de Dalmatie. Très découpée, largement boisée, sa côte regorge de plages, rochers, baies et fjords. Pelješac a été habité dans les vieux temps par des Illyriens, Grecs, Romains et, depuis le 7ème siècle, par les Slaves, Croates. Les historiens antiques le mentionnent comme Rathaneus Kersones : Cap des lynx.

Avec une tradition centenaire, Pelješac a portée les aventures de nombreux navigateurs et capitans, devenus légendaires par leur habileté et intrépidité en haute mer. Depuis les temps les plus reculés la péninsule est connue par ses vignobles, et ses vins des sortes « Dingač » et « Postup » sont connus aujourd’hui dans tout le monde.

Focus sur Ston, la muraille de Chine européenne

 

Ston, destination des touristes désireux de silence, de mer pure et d’un vrai état d’esprit méditerranéen. Grâce à sa situation juste sur l’isthme qui relie la presqu’île de Pelješac au continent ainsi qu’à ses exceptionnelles richesses naturelles, cet endroit est habité depuis des temps immémoriaux, ce dont témoignent un grand nombre de monuments culturels et historiques classés hors catégorie et de première catégorie.

Grâce à son importance économique et stratégique, Ston, après Dubrovnik, fut le site le plus important de la République ragusaine, en témoignent les murailles monumentales, construites au 14ème et 15ème siècle. A cette époque, la République ragusaine acheta en effet la péninsule de Pelješac et la région du littoral de Dubrovnik, suivant une ligne allant de Ston à Orašac.

Les murailles monumentales (5,5 km), les plus longues d’Europe, et la nature magnifique et intacte, se marient harmonieusement à l’architecture urbaine de Mali Ston et Veliki Ston. Les touristes sont tout spécialement attirés par la particularité gastronomique de cette région qui se mesure par le grand choix de coquillages de la baie de Mali Ston, en particulier les huîtres et les moules.


Impressions de reportages

 

Juste avant de quitter le village, nous échangeons quelques mots avec un vigneron fort sympathique qui a su savamment gérer nos contraintes de stationnement. Nous lui faisons part de notre surprise : certaines parcelles, dépourvue d’herbes offrent en effet un contraste saisissant avec les vignobles que nous avons pu parcourir jusque-là durant notre périple. Ce dernier nous explique que de grosses propriétés viticoles du continent en ont fait l’acquisition de parcelles et effectuent beaucoup de traitement avec la volonté d’en augmenter la productivité. Ce n’est guère au goût des vignerons autochtones qui estiment en effet que les conditions de culture sont exceptionnelles grâce au vent et un excellent drainage des sols… Fort avertis des résultats qualitatifs sur les terroirs voisins notamment ceux insulaires, et encore et toujours convaincus que la viticulture doit respecter ses terres, nous ne pouvons que les comprendre.

Nous ne prenons pas le risque d’engager notre « convoi » de l’autre côté du tunnel Dingac où la route est réputée très étroite et très pentue, conscients que les contraintes de longueur et de maniabilité mettraient l’expédition en péril. C’est donc en quad que nous allons à la découverte du dernier vignoble héroïque de notre fabuleux périple croate !

Quittant la plaine, nous empruntons un tunnel de plus de 400m de long ; un moment de fraîcheur bienvenue par cette belle journée ensoleillée… A peine parvenus côté sud, nous apercevons un vignoble qui plonge dans le bleu intense de l’Adriatique : des pentes denses (65 % par endroits) de vignes déploient leur splendeur vertigineuse…

Nous constatons que les vignobles de Dingac affichent un terroir très hétérogène, que l’on se trouve d’un côté ou l’autre de la montagne. Côté sud, les vignobles sont très ensoleillés avec des pentes et des températures estivales extrêmes. Côté plaine : des conditions climatiques sont d’une rigueur notable, surtout en hiver, tandis que les températures y sont régulièrement négatives, avec un record de -13,6 degrés.

 

C’est sur cet épisode péninsulaire que s’achève notre expédition photographique mémorielle en Croatie. Nous resterons à jamais éblouis par l’ineffable beauté de ses paysages de vignes et d’oliviers, la diversité de ses cépages endémiques et la qualité exceptionnelle de ses vins. Ici, les hommes ont su composer avec une nature sauvage, parfois extrême, et d’un ancrage puissant à leurs traditions ancestrales en déployer une vision d’avenir où philosophie et poésie jouent un rôle primordial. 

La dernière partie de cette campagne 2019 s’achèvera dans quelques jours. Nous voici partis en direction des Pouilles dans le sud de l’Italie. Là, nous nous confronterons aux ravages de l’épidémie de la xylella et y éprouveront la résilience de ceux de ses oliviers millénaires qui y ont survécu.

 

 

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